L’islam comme philosophie du mariage

     Introduction : « l’islam comme philosophie du mariage »

« L’islam comme philosophie du mariage » : de quoi s’agit-il ?

« Philosophie », au sens grec, c’est l’amour de la sagesse.

L’islam – tel que le Coran l’explique – est une sagesse pour tous.

L’islam n’est pas une religion, pas au sens moderne de religion qui se limite au lien entre l’homme et Dieu, ou de religion qui habite dans le cœur de chacun et qui reste de l’ordre de l’intime.

L’islam est une sagesse universelle qui vient éclairer la vie réelle, la vie quotidienne, individuelle et collective, intime et publique, spirituelle, intellectuelle, morale et sociale.

L’islam comme philosophie du mariage, ce n’est pas du droit musulman (fiqh al-zawâj ou fiqh al-nikâh), pas uniquement.

L’islam comme philosophie du mariage, ce n’est pas de la psychologie qui vient t’expliquer les émotions que tu ressens ou depuis quand tu souffres de ce dont tu souffres. Car l’être humain est plus grand que la somme de ses mécanismes psychologiques.

Pendant des milliers, quand on a des nœuds dans sa vie – quand on a besoin de faire face à une tension, de prendre une décision importante, de faire le bon choix, de se préparer à fonder un foyer, d’être conseillé, on va voir une personne sage –, un oncle, une grand-mère, une voisine, un proche, un saint ou un savant…

De même, dans la civilisation islamique, on ne va pas voir le juriste (spécialisé dans le droit de la famille, fiqh al-usrâ) ni le psy pour bien s’orienter dans les choses de l’amour et de la famille. On va voir le sage – un prophète, un savant, un saint ou une personne ordinaire parmi ses proches.

L’islam vient rappeler une sagesse universelle qu’on peut retrouver partout. Et l’islam, c’est d’abord le Coran, le Livre de la sagesse, Kitâb al-hikmah.

Et dans le Coran, il y a une histoire très éclairante, à partir de laquelle l’essentiel du sens de la vie est dit : c’est le récit de la création d’Adam et Eve (paix sur eux) :

« Lorsque Ton Seigneur dit aux Anges : ‘‘Je vais établir sur la terre un Khalîfah (successeur de Dieu).’’ Ils dirent : ‘‘Vas-Tu y désigner un être qui y mettra le désordre et répandra le sang, alors que nous sommes là à Te sanctifier et à Te glorifier ?’’. Il dit : « En vérité, Je sais ce que vous ne savez pas ! »[1].

Dieu a placé l’être humain dans cette Maison de Dieu (Bayt Allah), dans cette Maison commune qui est la Terre.

Ça veut dire quoi être Successeur, Khalîfah sur terre ?

Ça veut dire que l’être humain est le seul être vivant visible qui a le pouvoir d’être libre, libre de faire le bien et le mal.

L’ensemble de la création réalise la volonté de Dieu par nécessité, malgré elle, sous la forme de lois naturelles qui gouvernent son comportement. L’être humain a ce pouvoir de dérailler à tout moment. C’est ce qui rend sa vie risquée mais aussi digne, plus grande que la vie de l’ensemble de la création.

Dieu fait un pacte avec son Successeur, avec Adam, avec Eve, et au-delà, avec toute la famille humaine : jouissez de toutes les bonnes choses que Dieu vous a donné de jouir dans cette vie mais ne soyez pas injustes, ne répandez pas le désordre, soyez justes envers votre Créateur et envers toutes les créatures.

Le désordre est potentiellement en chacun d’entre nous et autour de nous. Hommes et femmes, on est parfaitement égaux dans notre capacité à faire le bien et de mal sur Terre.

Tous, on est invité à réaliser la volonté de Dieu sur terre, c’est-à-dire à réaliser le Vrai, le Bien et le Juste dans toutes les situations de la vie quotidienne : dans la façon de se marier ou de divorcer, dans les relations entre familles, dans ses relations avec les voisins, envers les plus vieux et les plus jeunes, dans sa cuisine, dans la façon de gagner sa vie, etc.

Si l’islam est une sagesse pour tous, c’est parce qu’elle vise à rendre chacun meilleur que ce qu’il n’est, meilleur dans les idées, valeurs, désirs, projets qui agitent son cœur ou son esprit ; meilleur dans sa langue, dans son expression publique et privée ; meilleur dans ses actes individuels et collectifs.

Si l’islam est une sagesse pour tous, c’est parce qu’elle vient de Dieu, Créateur de tous. C’est parce qu’elle est raisonnable et réaliste, à la portée de tous, chacun selon ses dispositions individuelles. Et Dieu ne peut pas être le Créateur de tous s’Il commande aux êtres humains de suivre une sagesse théorique irréalisable dans la pratique…

Parce que Dieu est parfaitement cohérent dans ses actes, et par amour de l’être humain qu’Il a créé, Il va l’aider à bien assurer sa vocation de Khalîfah, à résister au mal et à faire le bien.

Comment ?

Dieu dote l’homme d’une fitrah (tendance naturelle vers Dieu), d’une raison, de la capacité de connaître les noms de toutes choses, de lire (« Iqra ! »), d’écrire (al-qalam), bref, de comprendre et de transformer le monde…

Dieu lui envoie des révélations et des prophètes qui lui enseignent la sagesse (al-hikmah), c’est-à-dire l’art de traduire la volonté de Dieu dans les petites choses et les grandes choses de la vie quotidienne : dans la façon de vivre en famille, dans la façon de faire du commerce, dans la façon de prendre des décisions, dans la façon de traiter une calomnie, dans la façon de distinguer un discours vrai d’un discours erroné, dans les conversations sociales, dans la façon de marcher et de parler dans la rue, dans le traitement d’une dispute ou d’un conflit, dans la façon d’être pieux, dans la façon de vivre et de servir Dieu, etc.

« Ainsi, Nous avons envoyé parmi vous un messager de chez vous qui vous récite Nos signes, vous purifie, vous enseigne le Livre et la Sagesse et vous enseigne ce que vous ne saviez pas »[2].

La vocation de l’islam est de rendre l’homme et la femme meilleurs. C’est ce qu’affirme le dernier prophète de l’islam (Muhammad) :

« J’ai été envoyé pour parfaire les caractères et les ennoblir »[3].

Les prophètes, les savants, les hommes et les femmes qui vouent leur vie à Dieu – Abraham, Jacob, Joseph, la reine de Sabah, Moïse, Jésus, Marie, sont un exemple pour toute personne qui cherche à réaliser le Vrai, le Bien et le Juste dans sa vie.

Toute personne bonne, d’hier ou d’aujourd’hui, connue ou inconnue, d’ici ou d’ailleurs, peut être un exemple inspirant pour aider à comprendre, à s’améliorer soi-même et améliorer son monde.

Cette sagesse universelle nous enseigne que tout ne se vaut pas. Toutes les idées, toutes les valeurs ne se valent pas. Tous les désirs, toutes les intentions, tous les projets ne se valent pas. Certains participent au bien, d’autres au désordre dans le monde.

Toutes les façons de s’aimer, d’exprimer ses désirs et ses sentiments, de fonder un foyer ne se valent pas : certaines produisent du désordre en série – de la solitude, du célibat, des divorces, des conflits permanents ; d’autres permettent davantage de servir le bien commun, d’être solidaires, de diffuser de la joie et de la paix autour de soi…

Toutes les façons de cultiver l’amour ne se valent pas.

De même, toutes les façons de cultiver les fruits ne se valent pas. La façon industrielle actuelle – qui utilise la chimie et la technologie pour arracher en permanence et violemment des fruits à la terre – est en train de tuer la vie sur terre. Cette façon industrielle est efficace : ça marche, tout le monde l’utilise, même ceux qui la critiquent. Mais aujourd’hui on mesure combien cette façon de cultiver la terre est un mal pour tous.

Il existe une façon de cultiver les fruits plus respectueuse de l’écosystème, de la vie et du bien commun. Le bien commun, quand on veut cultiver un fruit – par exemple la banane – c’est le bien de tout ce qui entoure la banane : le ciel, l’air, les insectes, le sol, les plantes voisines, les animaux, et l’homme…

De la même manière, toutes les façons de cultiver l’amour et de fonder un foyer ne se valent pas.

« Se fréquenter pour apprendre à se connaître + sortir ensemble + vivre ensemble pour être sûr de savoir si c’est la bonne personne + et enfin se marier éventuellement » : c’est une façon de cultiver l’amour qui promet d’apporter plus de sécurité et de bonheur à toute personne qui veut aimer et vivre heureuse. L’intention est pure.

Mais cette façon de cultiver et de fonder l’amour, qu’est-ce qu’elle vaut ? Est-ce que ça marche ? Est-ce qu’elle tient sa promesse qui est d’apporter plus de sécurité et de bonheur à toute personne qui cherche à aimer ?

Sortons de tous les discours magiques, de tous les baratins pseudos intellectuels, scientifiques ou psychologiques pour trouver la réponse à cette grande question. Regardons la réalité en face. La réalité, ce n’est pas mon expérience individuelle ou celle de quelques individus : la réalité, c’est ce qui se passe à grande échelle.

Depuis les années 1970 en France – 10 à 20 ans plus tôt aux Etats-Unis d’Amérique – on a promis à chacun de mieux s’approcher du grand Amour et du vrai bonheur en cultivant ce chemin : « se fréquenter pour apprendre à se connaître + sortir ensemble + vivre ensemble pour être sûr de savoir si c’est la bonne personne + et enfin se marier éventuellement ». Les résultats objectifs – au-delà du baratin et des mots qui se moquent de nous – c’est la généralisation du divorce, du célibat, de l’amour jetable qui est en train d’abîmer les hommes et les femmes qui le pratiquent.

Dans la sociologie du couple moderne, on observe qu’une personne qui est en couple – mariée ou non – lorsqu’elle divorce ou se sépare, a tendance à ne plus se mettre en couple par la suite. Comme si l’âme et le corps de chacun avait une mémoire, une mémoire des expériences heureuses et malheureuses de la vie. Il y a des femmes, mais aussi des hommes, qui suite à un amour blessé, peuvent perdre toute capacité à aimer et à être aimé.

On voit combien le dépôt que Dieu a mis entre nos mains – notre liberté, notre temps de vie, notre âme et notre corps, notre capacité à faire le bien, à aimer et à être aimé – est précieux mais fragile.

Homme et femmes, nous ne sommes pas propriétaires : la Terre qui est notre Maison commune, mais aussi notre âme, notre corps, notre vie sont des dépôts qu’on devra rendre à Celui qui nous les a prêtés. Dieu invite chacun à prendre soin de ces dépôts, autrement on risque de devenir incapable de vérité, de justice, de bien, d’amour et de bonheur.

Si l’islam est une sagesse universelle, c’est en ce sens qu’elle offre un autre chemin pour cultiver et pour fonder l’amour : le mariage.

 

     Ça veut dire quoi se marier ?

      Se marier, c’est faire le choix de cultiver l’amour durable

Le mariage est un chemin – sabîl –, une méthode, une façon de fonder et de cultiver l’amour, une façon de cultiver le bien commun, une façon d’accueillir ou de s’intégrer dans deux familles plus larges…

Toute personne a besoin d’avoir un axe central dans sa vie, une ligne de force, une direction, comme l’illustre très bien Saint Exupéry, dans Citadelle. Ton temps, tes idées, tes valeurs, tes bons sentiments, tes efforts… : tu ne peux pas les exprimer dans tous les sens. Tu as besoin, comme le soleil, d’un axe autour duquel tu vas graviter. Le mariage est un centre de gravité qui gouverne tes sentiments, tes comportements, tes relations et ta direction.

Le mariage est un chemin à travers lequel chacun est invité à poursuivre 4 grandes finalités.

1. Se marier, c’est vivre en harmonie avec sa nature et avec la morale

Quand Adam et Eve (paix sur eux) sont au paradis, tout est permis, sauf les fruits d’un arbre. Tout est permis, tout est bon, sain innocent, offert à leur jouissance. Sauf un arbre qui, s’ils le touchent va les conduire vers l’injustice.

De même, une fois qu’ils sont placés sur terre, tout est permis, sauf quelques interdits qui sont explicitement désignés par Dieu, pour éviter à l’homme de tomber dans l’injustice contre lui-même, contre les autres ou contre Dieu.

Jouir des bonnes choses, aimer une femme ou un homme, cultiver le plaisir à deux : tout ça fait partie des bonnes choses que Dieu nous a offertes. C’est un signe. Le signe de notre interdépendance – l’homme et la femme ont besoin l’un de l’autre – le signe de Sa Bonté et le signe de Son Unicité.

Dieu a créé toute chose par couple, par paire, par deux, par zawj.

Dans la langue arabe coranique, le mot pour dire « le couple » – al-zawj – est de la même racine que al-zawâj, le mot pour dire « mariage ». Car se marier, c’est rejoindre l’ordre universel naturel. Se mettre en couple, c’est se marier, à l’image de toute la création qui est composée d’une infinité de couples.

« Louange à Celui qui a créé tous les couples de ce que la terre fait pousser, d’eux-mêmes, et de ce qu’ils ne savent pas ! ».[4]

Tout ce qui vit, tout ce que Dieu a créé, existe en couple, par deux, par pair. Parce que toutes les créatures dépendent les unes des autres. Parce que l’homme et la femme sont interdépendants, ont besoin l’un de l’autre, ont besoin de se soutenir, de se compléter et d’être solidaire l’un vis-à-vis de l’autre.

Dieu est l’Unique, Celui qui ne dépend de rien ni de personne. L’indépendance est une qualité divine. L’interdépendance est une qualité humaine et universelle.

Se marier sans s’aimer et sans prendre du plaisir à deux, ce n’est pas l’idéal de vie vers lequel l’islam invite chacun. Mais d’une époque et d’une culture à l’autre, l’être humain a parfois encouragé le mariage sans amour et sans plaisir, ainsi que l’amour et le plaisir en dehors du mariage.

D’un point de vue historique, la civilisation islamique est connue pendant des siècles pour avoir encouragé à cultiver l’amour et le plaisir sexuel innocent à l’intérieur du couple marié.

Le Coran rappelle à chacun qu’aimer, prendre du plaisir à deux, lorsqu’on le fait de la bonne façon, est un acte bon, sain et innocent.

Car l’amour (al-hubb) est comme une graine (habbah) que Dieu a plantée dans le cœur de chacun. Le mariage est l’art de cultiver cette graine pour en donner de bons fruits : de la joie, de la paix, du bonheur, de la fraternité sociale, de l’entraide, des enfants, etc. C’est l’art de cultiver des plaisirs sains et innocents dans l’intimité du couple. Si faire des enfants est une bonne chose, la finalité du mariage ne s’arrête pas à faire des enfants : il y a aussi le plaisir et les moments intimes qu’un homme et une femme partagent.

Tous les désirs, tous les plaisirs ne se valent pas : certains conduisent à l’injustice contre sa femme ou son homme, contre les autres ou contre soi-même.

L’islam, c’est le grand « oui à la vie » et le grand Non à la médiocrité et à l’injustice, dans tous les champs de la vie. Nietzsche avait très bien compris l’islam. Lui qui a tellement critiqué la religion, a très bien compris la radicale différence de la sagesse universelle que l’islam rappelle : aimer, désirer, prendre du plaisir ne sont pas un mal. Oui à ses désirs ! Mais non aux désirs qui sont source d’injustice. La civilisation islamique « disait oui à la vie »[5].

2. Se marier, c’est mettre le parfum de l’amour dans un flacon

Toute chose précieuse et fragile a besoin d’être protégée par quelque chose de solide, de la même manière qu’un liquide a besoin d’être protégé par un solide pour durer dans le temps. Ainsi, par exemple, le parfum a besoin d’un flacon pour durer, pour être entretenu et pour qu’on puisse le sentir sur la durée. Sinon il s’évapore et finit par disparaître.

De même, se marier, c’est mettre le parfum de l’amour dans le flacon du mariage pour le protéger.

Le mariage ne suppose pas un homme et une femme parfaits pour se marier. Bien au contraire, c’est parce que l’homme et la femme sont imparfaits qu’ils ont besoin de se parfaire à travers le mariage. C’est parce qu’ils sont tiraillés par des idées, des désirs et des comportements instables qu’ils ont besoin d’un « flacon » pour les contenir, les protéger contre eux-mêmes et contre l’extérieur.

Sans le flacon, on ne peut pas profiter du parfum au-delà de l’instant.

De la même manière, lorsqu’on dit aimer Dieu, on ne peut pas simplement l’aimer et l’exprimer quand on veut, car en fait, ça revient à vivre la plupart du temps dans l’oubli de Dieu. On a besoin de mettre cet amour qu’on a pour Dieu dans un « flacon » : à travers des prières régulières, des intentions, des paroles et des actions bonnes au quotidien, à travers des rituels ou des rendez-vous permanents, quelle que soit la météo émotionnelle personnelle, que ce soit en période de bonheur ou d’épreuve…

Autrement dit, parce que l’être humain est imparfait, il a besoin de rituels de prière pour adorer Dieu. Sinon, son sentiment d’aimer Dieu, son envie de plaire à Dieu serait tellement instable, qu’il passerait sa vie à s’éloigner de Dieu.

De même, le mariage n’est pas fait pour des personnes parfaites. Parce que l’être humain est imparfait, il a besoin de s’engager dans un mariage, devant Dieu, devant deux familles, devant une communauté, devant un homme ou une femme, pour que la parole donnée prenne la force d’une loi naturelle. Il a besoin de se marier pour se parfaire, pour offrir à ses émotions positives un flacon qui les protège, et à ses émotions négatives, des limites qui le contiennent.

3. Se marier, c’est dire des « Non » et un « Oui » fondateur

Chaque homme et chaque femme ouvre son cœur à l’islam en exprimant la shahâdah (témoignage) qui signifie :

« Non aux idoles (c’est-à-dire aux idées, aux valeurs, aux normes, aux cultures et aux pouvoirs qui trahissent le sens du Vrai, du Bien commun et du Juste) ! », « Oui à Dieu l’Unique (j’accepte donc de servir le Vrai, le Bien commun et le Juste en toute situation) ! ».

Tout homme et toute femme qui ose dire ces « Non ! » et ce « Oui ! » entrera au Paradis, car cette parole engage toute sa personne et toute sa vie.

De la même manière, se marier, c’est dire « Oui » à une femme et « Non » à la maximisation de son épanouissement personnel.

Pour que l’engagement dans le mariage prenne la force d’une loi naturelle, chaque homme et chaque femme est appelé à honorer son engagement moral, à tout donner pour le respecter, car la promesse tenue est une promesse qui fait tenir, qui donne la force de tenir ensemble. C’est pourquoi Dieu rappelle et insiste sur la nécessité d’honorer son engagement dans toutes les affaires humaines :

« (…) quiconque remplit sa promesse et craint Dieu… Dieu aime les pieux ».[6]

Etre pieux ici, c’est tenir sa promesse, c’est accepter qu’un engagement te tienne, car il exige de toi, car il t’appelle à donner le meilleur de toi-même, à persévérer, même lorsque tu es tenté de lâcher.

4. Se marier, c’est faire alliance

Dieu a fait alliance avec Adam et Eve, avec l’ensemble de la famille humaine : jouissez de toutes les bonnes choses, faites le bien et ne répandez pas le désordre sur terre. Et Je m’engage à pardonner vos pêchés et à vous combler de mes bienfaits, au Paradis.

Le croyant est celui qui accepte de faire alliance avec Dieu, donc de servir le Vrai, le Bien et le Juste dans toutes les situations de la vie quotidienne, avec les autres. Autrement dit, faire alliance avec Dieu, c’est faire alliance avec les hommes et la nature :

« Et c’est Lui qui de l’eau a créé une espèce humaine qu’Il unit par les liens de la parenté et de l’alliance. Et ton Seigneur demeure Omnipotent »[7].

« Et rappelez-vous le bienfait de Dieu sur vous, ainsi que l’alliance qu’Il a conclue avec vous, quand vous avez dit : « Nous avons entendu et nous avons obéi ». Et craignez Dieu. Car Dieu connaît parfaitement le contenu des cœurs »[8].

Les Enfants d’Israël ont fait alliance avec Dieu. Leur expérience est un signe pour tout croyant aujourd’hui. Leur expérience renvoie vers ce signe : reconnaître que Dieu est, qu’Il est Unique, Maître de tout, c’est donc s’engager à se mettre au service de sa Volonté. Se mettre au service de sa Volonté, c’est donc s’engager auprès des hommes et de la nature, dans toutes les situations de la vie, à réaliser le Bien et à résister au désordre :

« Moïse retourna donc vers son peuple, courroucé et chagriné ; il dit : « O mon peuple, votre Seigneur ne vous a-t-Il pas déjà fait une belle promesse ? L’alliance a-t-elle donc été trop longue pour vous ? Ou avez-vous désiré que la colère de votre Seigneur s’abatte sur vous, pour avoir trahi votre engagement envers moi ? »[9].

« Et (rappelle-toi), lorsque Nous avons pris l’engagement des enfants d’Israël de n’adorer que Dieu, de faire le bien envers les pères, les mères, les proches parents, les orphelins et les nécessiteux, d’avoir de bonnes paroles avec les gens ; d’accomplir régulièrement la prière et d’acquitter l’impôt social purificateur (la zakât) ! Mais à l’exception d’un petit nombre d’entre vous, vous manquiez à vos engagements en vous détournant de Nos commandements »[10].

De la même manière, se marier, c’est faire alliance avec Dieu, avec sa famille, avec sa belle-famille, avec sa femme ou son homme.

Faire alliance avec ses deux familles, c’est s’engager à affronter ensemble, en communauté, les combats de la vie : la maladie, le chômage, le travail difficile, les crises, les conflits, l’éducation des enfants, les tâches ménagères…

Personne ne sait de quoi sera fait demain. Mais se marier, faire alliance, c’est prendre la décision que demain se fera ensemble, dans l’entraide, dans la solidarité, au service du bien commun.

Se marier, c’est, au nom de Dieu, pour Dieu, accepter de se mettre au service de sa petite et grande famille.

Cette vie est un espace de mise à l’épreuve de notre fidélité à Dieu. Chaque croyant est mis à l’épreuve : par son mariage ou par son célibat, par son voisin, par son ami ou son ennemi, par la peur de rater sa vie ou de manquer de richesse, par la peur de ne pas avoir d’épouse ou d’époux, ou d’enfants. Marié ou célibataire, chacun est mis à l’épreuve dans sa fidélité au Vrai, au Bien et au Juste.

Notes

[1] Coran 2 : 30

[2] Coran 2 : 151

[3] Hadîth Rapporté par Malik dans al-Muwatta

[4] Coran 36 : 36

[5] « Le christianisme nous a frustrés de la moisson de la culture antique, et, plus tard, il nous a encore frustrés de celle de la culture islamique. La merveilleuse civilisation maure d’Espagne, au fond plus proche de nous, parlant plus à nos sens et à notre goût que Rome et la Grèce, a été foulée aux pieds (et je préfère ne pas penser par quels pieds!) – Pourquoi ? Parce qu’elle devait le jour à des instincts aristocratiques, à des instincts virils, parce qu’elle disait oui à la vie, avec en plus, les exquis raffinements de la vie maure ! Les croisés combattirent plus tard quelque chose devant quoi ils auraient mieux fait de se prosterner dans la poussière ». Nietzsche (1974), L’Antéchrist, §§ 59 et 60, éditions Gallimard

[6] Coran 3 : 76

[7] Coran 25 : 54

[8] Coran 5 : 7

[9] Coran 20 : 86

[10] Coran 2 : 83

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